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mercredi 9 mars 2016

Loi Travail: vademecum à l'usage des lycéens qui manifestent pour manifester

Quel et le vrai (et le faux) des arguments entendus sur la loi Travail ?

Quand 
les étudiants interrogés par la presse savent parfois -à grands traits flous- CONTRE quoi ils défilent,  ils ne semblent pas connaître le POUR du projet

Faute de concertation du gouvernement socialiste avec les représentants des salariés et des étudiants, pourtant très marqués à gauche, le texte du projet de réforme du Code du Travail n'est connu que pour ce qui en a fuité.  Il n'existe pour l'heure qu'un avant-projet de loi adressé... le 18 février au Conseil d'Etat, puis diffusé par le cabinet de la ministre du Travail, pour être présenté par  Myriam El Khomri, le 9 mars en Conseil des ministres. Le projet que Manuel Valls lui fait porter vise à "instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actifs".
Ces lignes sont plus largement destinées à ceux et celles qui veulent apprendre... alors que les syndicats de lycéens et d'étudiants, soutenus par la CGT et FO, appellent à une première  journée de mobilisation ce mercredi 9 mars. Ce texte qui prévoit une réforme du code du Travail est donc toujours en cours d'écriture, particulièrement depuis que le gouvernement a été contraint d'ouvrir -et non rouvrir- des négociations avec les partenaires sociaux, sous la pression de la gauche, depuis les frondeurs socialistes emmenés par Martine Aubry, jusqu'à l'extrême gauche, déterminée à rejouer la scène du rejet du CPE (contrat première embauche), un type de contrat de travail à durée indéterminée (CDI), à destination des moins de 26 ans prévu par l'article 8 de la loi pour l'égalité des chances du 2 avril 2006, abrogée le 21. 
Hollande redoute plus que tout que la jeunesse, dont il avait fait une priorité de son quinquennat, ne lui arrache la démission de Valls, son premier ministre détesté, qualifié de "p'tit zizi" par les agriculteurs.

"L'objectif de cette réforme n'est pas de précariser la jeunesse,
assure sa mère-porteuse, 
pour les convaincre, mais d'encourager l'embauche en CDI", au risque de les tromper sur les conditions restrictives que cela implique. Génération précaire qu'on identifie à Julien Bayou (ex-stagiaire à Alternatives économiques, ex-conseiller d'Eva Joly, candidate EELV à la présidentielle 2012 et chargé de campagnes pour Avaaz, ONG de cybermilitantisme) riposte d'ailleurs : "Cette réforme les précarise pendant leur CDI. C'est un non-sens social. On ne se bat pas pour avoir un contrat de travail au rabais", dit ce collectif de stagiaires connu pour ses 'flashmobs', visages dissimulés derrière des masques blancs, et ses interventions médiatisées.

Ce projet de loi concentre les dissensions idéologiques, particulièrement au sein de la gauche. Qui dit vrai? Pour se faire une religion, il faut se pencher sur les arguments des uns et des autres pour démêler le vrai du faux contenu dans sept points clés de l'avant-projet de loi.

Les indemnités prud’hommales seront réduites ?

C'est vrai. Le gouvernement veut plafonner les indemnités selon l'ancienneté du salarié. Trois mois de salaire pour un salarié dont l'ancienneté est inférieure à deux ans, six mois entre deux et cinq ans, neuf mois entre cinq et dix ans. Le maximum est de 15 mois pour une ancienneté de plus de 20 ans. Selon une étude du ministère de la Justice portant sur les 401 arrêts rendus par les Prud'hommes en octobre 2014, la réforme est globalement défavorable aux salariés, particulièrement pour ceux ayant entre deux et dix ans d'ancienneté.

Le gouvernement justifie cette baisse. Il assume de reprendre à son compte une proposition du patronat "au nom de l'emploi". Selon Emmanuel Macron qui avait tenté d'introduire la disposition dans sa loi (elle a été retoquée à l'époque par le Conseil constitutionnel), la mesure est censée donner de la visibilité aux chefs d'entreprise. En clair, dans un contexte de chômage record, il pense qu'en permettant aux dirigeants de savoir combien leur coûtera la séparation d'un salarié, ils seront plus enclin à embaucher en CDI au moment où 90% des nouvelles embauches se font en CDD.

On pourra licencier plus facilement

C'est vrai. Alors qu'il appartient aujourd'hui au juge de dire si un licenciement économique est justifié, le projet de loi envisage de dégager des critères objectifs qui permettront à l'employeur de décider si un licenciement est "juste". En cas de baisse du chiffre d'affaires (ou du carnet de commandes) pendant plusieurs mois consécutifs, un employeur pourra se séparer de salariés. De plus, les groupes internationaux qui possèdent une entreprise en France n'auront plus à justifier de difficultés au niveau du groupe dans son ensemble mais seulement de son entreprise en France.

Ce que le gouvernement défend. Comme pour les indemnités prud'homales, le gouvernement fait de ce point une concession aux chefs d'entreprise pour les inciter à l'embauche, selon le principe que plus les conditions pour se séparer d'un salarié sont lisibles, plus ils sont incités à embaucher.

C'est la fin des 35 heures

Et c'est faux, si on considère que l'avant-projet de loi portée par El Khomri pose deux principes: la durée légale du travail effectif des salariés à temps complet est fixée à 35h par semaine et "toute heure accomplie au-delà est une heure supplémentaire" qui ouvre droit à une compensation. La majoration de minimum 10% est également maintenue. Et contrairement à la rumeur, rien ne change sur la durée maximale de travail qui reste fixée à 48h (plafond européen) auquel il est possible de déroger jusqu'à 60h.

Mais le diable est dans les dérogations. La loi envisage de pouvoir déroger plus longtemps à cette durée légale de 35 heures. En cas d'accord dans les entreprises, les salariés pourront travailler jusqu'à 44 ou 46h par semaine pour un maximum de 16 semaines (contre 12 aujourd'hui). 
De plus, en cas d'accord d'entreprise, il sera possible de descendre sous les 25% de majoration salariale qui sont la norme pour les heures supplémentaires.

Les mineurs pourront être appelés à travailler plus

C'est vrai. Le projet de loi prévoit d'assouplir les conditions de travail des apprentis mineurs qui ne peuvent pas travailler aujourd'hui plus de 8h par jour et 35h par semaine, sauf autorisation de l'inspecteur du Travail. A "titre exceptionnel ou lorsque des raisons objectives le justifient", ces durées pourront passer à 10 et 40h. De plus, il suffira que l'inspection du Travail soit informée.

Comment le pouvoir socialiste se justifie. Selon l'exposé des motifs, le gouvernement (qui vient de se doter d'une secrétaire d'Etat à l'Apprentissage, Clotilde Valter) entend -à son tour et après quatre ans- "développer l'apprentissage" et adapter le rythme de travail de l'apprenti "à celui de la communauté de travail dans laquelle il évolue". Seuls quelques secteurs, dont le bâtiment, seront concernés.

C'est la fin du pouvoir de négociation des syndicats

Les syndicats pourraient perdre
leur emprise sur les salariés
C'est vrai. Le texte prévoit que les accords collectifs signés dans l'entreprise doivent l'être par des syndicats représentant au moins 50% des salariés (ou par des syndicats représentant 30% des syndicats, si ceux représentant la moitié des salariés ne s'y opposent pas). C'est le cas aujourd'hui. Seulement pour éviter des blocages, une consultation des salariés par référendum pourra être organisée pour valider les accords et passer outre l'opposition des syndicats hostiles. 

Des garde-fous... Ce référendum d'entreprise ne pourra pas se faire à la demande de la direction, comme ce fut le cas pour Smart. Ils pourront seulement être proposés par des syndicats représentant au moins 30% des salariés.

Le repos quotidien n'est plus protégé

C'est vrai. Alors qu'aujourd'hui la loi prévoit qu'entre deux journées de travail, un salarié doit avoir un repos consécutif de 11h, le texte de loi prévoit que ce repos puisse être fractionné.

Un bémol... Le projet de loi émet deux conditions: cela ne peut intervenir que sur demande du salarié et par accord d'entreprise qui devra alors fixer une durée minimale de repos consécutif.

Une journée d'astreinte, comptée comme une journée rémunérée de repos

C'est vrai. Quand un salarié d'astreinte n'intervient pas, son temps d'astreinte est considéré comme du repos (mais il est rémunéré). Le projet ne change pas cette règle.

Pourtant... Aujourd'hui un salarié qui travaille pendant son astreinte à droit à 11 heures de repos à l'issue de son intervention. Le texte envisage d'accorder un repos dont la durée ne pourradépasser la durée de l'intervention.

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